Quoi qu'il en soit, l'abbatiat d'Élisabeth à Yerres prit certainement fin dans les derniers jours de l'année 1310, ou bien tout au commencement de l'an 1311; puisque le 1er mars de cette année, Marguerite de Courtenay fut placée à la tête de notre abbaye. La nouvelle titulaire était fille de Jean II de Courtenay, seigneur d'Yerres, et d'Isabelle de Corbeil. Les |
103 discussions au sujet de la justice, entre le monastère et les seigneurs, n'avaient point empêché ceux-ci de confier aux moniales la garde et l'éducation de leurs filles. Marguerite avait été élevée à l'abbaye et y avait passé toute sa vie. Elle était à la fleur de l'âge, lorsqu'elle fut appelée à y porter la crosse. Ce n'était qu'une enfant d'à peine vingt ans; et il est probable que son élection fut le résultat des influences de famille, une sorte de transaction entre les religieuses et le seigneur du lieu. Hélas! malgré sa jeunesse, Marguerite ne gouverna pas longtemps; car elle mourut le 7 juin 1312, après un abbatiat de
quinze mois, sans qu'il soit resté la moindre trace de son gouvernement. Sa mémoire avait si bien péri dans le souvenir de ses sœurs, que celles-ci, ayant négligé pendant un certain nombre d'années, de tenir leur Obituaire au courant, le nom de Marguerite de Courtenay, fille du seigneur de la paroisse et abbesse de la maison, n'y a pas été inscrit, à moins qu'on ne veuille la reconnaître dans cette
Marguerite d'Yerres, inscrite le 15 avril, après avoir légué dix sols, à prendre sur le moulin de Mazières, possédé en partie par les Courtenay. Cet oubli est d'autant plus extraordinaire, que sa tombe se voyait encore dans l'église abbatiale au XVIIIe siècle, témoin irrécusable de sa sépulture au milieu des religieuses dont elle avait été la supérieure. Elle y était d'ailleurs fort à sa place, entre les tombes de sa double famille, religieuse et naturelle; car, comme l'a établi du Bouchet, l'historien des Courtenay, l'abbaye d'Yerres servait de nécropole à la branche de cette illustre famille, qui posséda pendant deux siècles environ, la seigneurie d'Yerres
1). Toutefois |
104 il est à noter que du Bouchet lui-même n'a pas rangé l'abbesse Marguerite parmi les Courtenay ensevelis sous les voûtes de l'église abbatiale.