La vente après-décès de Louise Abbéma (14-15 décembre 1927)
Dossier de presse compilé par Bernard Gineste (janvier 2025)
Le Journal des arts (10 décembre)
Anonyme, “Bulletin des expositions et des ventes”, Le Journal des arts 49/75 (10 décembre 1927) 1.
BULLETIN DES EXPOSITIONS ET DES VENTES.
Paris, Départements, Étranger
À L'HÔTEL DROUOT ET EN VILLE
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Mercredi 14
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Salle 2. — Succession de Mlle Louise Abbéma. — Vente de mobilier, bronze, porcelaines, tapisserie, tapis. (Me Gabriel.)
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Jeudi 15
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Salle 2. — Succession de Mlle Louis-Abbéma [sic]. — Vente de mobilier, bronze, porcelaines, tapisserie, tapis. (Me Gabriel.)
Le Petit Parisien (12 décembre)
Anonyme, “Les Grandes ventes”, Le Petit Parisien (12 décembre 1927) 2.
LES GRANDES VENTES
La bibliothèque de Gabriel Huotaux, les objets d'art de Louise Abbéma et les bijoux de Mme Darracq
Aujourd'hui, commence à l'Hôtel des Ventes la dispersion de la bibliothèque de M. Gabriel Hanotaux, qui constitue un ensemble rare de documentation et d'ouvrages sur la littérature du dix-septième siècle.
Mercredi l'on vendra le mobilier et les objet d'art ayant appartenu à Mme Louise Abbéma. Au catalogue figurent notamment un buste sculpté par Sarah Bernhardt, ainsi que des souvenirs et autographes de la grande tragédienne et des toiles de divers peintres.
L'Académie française fera réaliser à la Salle des ventes, le mercredi 21 décembre, le don qu'elle a reçu de Mme Darracq et qui consiste en un collier de quarante et une perles et divers bijoux enrichis de diamants et pierres fines.
Cette donation, on le sait, a été faite pour constituer des legs en faveur de veuves nécessiteuses chargées d'enfants.
Paris-midi (14 décembre)
Mad H.-Giraud, “Les meubles de Louise Abbéma”, Paris-midi 16/846 (14 décembre 1927) 2.
À L'HÔTEL DES VENTES
Les meubles de Louise Abbéma
Épars dans la grande salle, ils sont là, les meubles au milieu desquels la grande artiste a passé sa vie. Ils offrent cet aspect hétéroclite et malheureux des objets qui ont quitté leur place et ne savent plus où mettre leurs pieds de chaises et leurs bras de fauteuils. Ils ont l'air désunis, tous ceux-ci qui s'accordaient si bien dans la même pièce, meubles, bibelots japonais, chaises en tapisseries en belles vieilles tapisseries. La salle à manger garde son air froid, entassée dans un coin.
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Un vieux monsieur à longs cheveux essaye le piano droit avec des doigts experts et une vieille dame mesure la largeur d'un buffet avec son mouchoir de poche. Les vieilles dames prennent volontiers les mesures des meubles dont elles aiment prévoir l'emploi.
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Sous des vitrines, des miniatures, des éventails, un gros trousseau de toutes les clefs. La brosserie d'ivoire au chiffre L. A., quelques bijoux sans valeur, souvenirs précieusement gardés. Et toutes les décorations fort nombreuses, il y en a de tous les pays.
Partout des photographies et surtout, des photographies de Sarah Bernhardt avec les dédicaces des plus affectueuses. La grande Sarah dans tous ses costumes.
Entre deux de ces Sarah-là, Edmond Rostand, plus loin Sardou. Un buste de Louise Ahbema, quelques vases anciens, des potiches, un bronze doré et des bibelots rassemblés au hasard. Une fourrure dans une vitrine et des tapis aux murs.
Les visiteurs sont la, qui évaluent, apprécient, font leur choix, en attendant l'heure de la lutte serrée autour de tout ceci qui appartient à une grande artiste.
Mad H.-Giraud.
Le Gaulois (15 décembre)
Jean Berthollin, “Une vente, deux souvenirs”, Le Gaulois 62/18333 (15 décembre 1927) 1.
PETITE FEUILLE
Une vente, deux souvenirs.
Moins de cinq mois après la mort de Louise Abbéma, les derniers souvenirs, de sa vie intime sont dispersés à l'Hôtel des Ventes. La vente a commencé hier, elle s'achèvera aujourd'hui.
Poussé plus encore par la sentimentalité que par un désir curieux, nous sommes allé, avant que retentît le marteau des enchères, visiter la dernière “exposition” de la vieille et douce artiste.
Nous y vîmes son buste en marbre, exécuté par Sarah Bernhardt, sa main unie à celle de la grande actrice, en maquette et coulées en bronze; un bizarre projet de fontaine publique avec, pour motif monumental, la tête de l'illustre tragédienne; deux médaillons-plaquettes, à mi-relief, en étain bruni repoussé, dont l'un représente Sarah, de profil, par Louise Abbéma, et cette dernière, de profil aussi, par Sarah Bernhard. Témoins déjà vétustes d'un passé récent et d'une amitié célèbre.
Des livres dédicacés s'amoncelaient. Sur les pages de garde nous lûmes les signatures de Loti, Anatole France, Gyp, Courteline, Jean Lorrain, Alphonse Daudet, Maizeroy, et, d'une écriture svelte et mauve, ces lignes de vaticinateur: “À Louise Abbéma, l'être admirable et délectable, en dévouement ambitieux parce qu'il est profond. — Péladan.” Parmi les fascicules, les catalogues et les brochures, de lourds albums contenant des coupures de journaux, des articles de critiques, toutes les photographies des tableaux de l'artiste. Des feuilles détachées portant des copies, des croquis, des ébauches, des études féminines. Un luxueux programme, illustré par Louise Abbéma, consacré au “Gala de la Renaissance en l'honneur de Sarah Bernhardt 18 décembre 1896”, avec cette indication: “Les poètes Coppée, Heredia, Catulle Mendès, Rostand, Theuriet diront à Mme Sarah Bernhardt les sonnets qu'ils ont composés pour elle et la couronneront sur la scène…” Sur une page, un autographe d'Edmond Rostand.
Dans une vitrine, des bagues à ornements lourds, des épingles à pierres serties, la Légion d'honneur, les palmes académiques, la croix du Mérite agricole décernée à Louise Abbéma qui aima tant les fleurs. Plus loin, une commode à ornements de cuivre, un bureau, un piano de palissandre, une haute cheminée de bois aux griffons en consoles, des coffrets, un buste de Girardin, d'innombrables vases de porcelaine, poussiéreux, fragiles.
Pendant que nous considérions tous ces objets prêts à être disséminés en des mains inconnues, des commissionnaires travaillaient, travaillaient, indifférents en apparence. Nous dîmes à d'un d'eux: “Ce soir, demain, il n'y aura plus rien…” “Si, répondit cet humble, il y aura le souvenir….”
Jean Berthollin
Le Journal (15 décembre)
“Anonyme, “La vente des meubles de Louise Abbéma”, Le Journal 12842 (15 décembre 1927) 4.
La vente des meubles de Louise Abbéma
Meubles fatigués, étoffes ternies, menus bibelots, tout cela entassé comme pour faire une barricade: ce sont les “biens” de Louise Abbéma qui ont été vendus, hier, aux enchères.
Faut-il dire qu'il n'y eut guère d'amateurs pour ces vieilles choses qui représentent pourtant une somme considérable de souvenirs.
Le fauteuil où rêvait Sarah Bernhardt finira sans gloire sa carrière dans la boutique d'un brocanteur. Et la timbale où buvait Sardou n'aura pas un plus brillant destin.
Et fin de Journée, le fameux buste que Sarah sculpta pour sa grande amie, trouva preneur, avec quelque difficulté, à trois cent dix francs.
Le Quotidien (16 décembre)
Anonyme, “Les grandes ventes”, Le Quotidien 5/1768 (16 décembre 1927) 5.
LES GRANDES VENTES
(…)
Parmi les meubles et objets dépendant de la succession de Louise Abbéma, toutes choses assez banales et sans grande importance, on remarquait quelques souvenirs de Sarah Bernhardt.
(…)
La Liberté (16 décembre)
Anonyme, “Revue des ventes”, La Liberté 62/23240 (16 décembre 1927) 5.
LA CURIOSITÉ (…) REVUE DES VENTES
(…) Me Gabriel, réalisant la succession de Louise Abbéma, adjugea le buste de cette artiste, par Sarah Bernhardt, 360 francs (…).
Journal des débats (16 décembre)
Anonyme, “Curiosité”, La Liberté 139/348 (16 décembre 1927) 3.
LA CURIOSITÉ
(…) Enfin Me Gabriel, qui réalise la modeste succession de Louise Abbéma, obtenait d'un buste de cette artiste, par Sarah Bernhardt, 360 fr. (…).
L'Œuvre (20 décembre)
Anonyme, “Curiosité”, L'Œuvre 4463 (20 décembre 1927) 2.
On a vendu hier l'atelier de Louise Abbéma
Ce ne fut pas une grande vente, certes, mais le public qui emplissait la salle 7 de l'Hôtel Drouot était des plus curieux, les petits brocanteurs s'y mêlant aux amis de celle qui fut, elle aussi, “la bonne Louise”. On sait que l'artiste peintre mourut il y a quelques mois à l'âge de quatre-vingts ans passés. Me Gabriel était chargé de la vente, et M. Marboutin l'assistait à la table des experts.
On vendit d'abord des tableaux de Clairin, Lepic, De Nittis, Régamey, Sarah Bernhardt, qui ornaient les murs de l'atelier. Ils n'atteignirent pas de bien gros prix, si l'on excepte une aquarelle de De Nittis qui fut payée 2.400 francs. On adjugea 2.000 fr. un album réunissant des dessins de Carle Vernet, J.-B. Isabey, Ciceri. Puis on dispersa les Abbéma, les petits tableaux étant adjugés par lots de dix ou quinze, à 40 ou 50 francs en moyenne. Un grand portrait de vieille dame, dont l'expert demanda 50 fr. fut abandonné à 28. Un autre, celui d'un monsieur tenant un chien sur ses genoux, trouva preneur à 32. Sur estimation de 500 francs, une marine richement encadrée atteignit péniblement 105. Enfin, un portrait de Louise Abbéma par Régamey ne dépassa pas 55 francs.
On avait vendu précédemment les meubles. Un buste de l'artiste par Sarah Bernhardt fit 360 francs.
Candide (22 décembre)
Miguel Zamacoïs, “Un flâneur à l'Hôtel des Ventes”, Candide 4/197 (22 décembre 1927) 7.
Un flâneur à l'Hôtel des Ventes
L'hôtel Drouot a ressemblé ces jours-ci à un lugubre colombarium. Dans une salle, c'était la vente de Louise Abbéma; dans une autre, voisine, celle de Georges Petit. Deux figures, bien parisiennes au temps où il y avait des choses et des gens bien parisiens.
Je revois Louise Abbéma avec son profil chevalin, sa jaquette serrée à la taille ornée de l'énorme ruban rouge, son col et sa cravate d'homme, et suivie de deux bassets trottinant. Elle venait chez Sarah Bernhardt, dont elle était l'amie de toujours, de toutes les répétitions générales, de toutes les fêtes, de toutes les épreuves aussi.
Quel bric à brac! Et quelle tristesse!
Quels héritiers ont accepté, ordonné même, pour réaliser un misérable supplément de gain, l'étalage de ces pauvres vieilles photographies sans cadres, fatiguées, poussiéreuses, sur quoi se distinguent d'affectueuses dédicaces de Sarah, de Rostand, de Baretta-Worms?… Les héritiers, décidément, sont sans pitié.
Je revois aussi Georges Petit, le fondateur de la Galerie de la rue de Sèze, avec son “bouc” grisonnant, ses yeux fins et souriants, et son aimable corpulence.
Pourquoi n'a-t-on pas vendu, comme il semblait naturel, les tableaux, dessins et objets d'art lui ayant appartenu, dans la belle salle qui était son œuvre? Son ombre, semble-t-il, eût pris plaisir à profiter à son tour du prestige mondain attaché à la galerie sélecte, et auquel tant d'autres ventes ont dû une évidente plus value. Qui sait de combien se serait enflé le million deux cent mille francs réalisé dans la modeste salle n°6 de la rue Drouot?
Miguel Zamacoïs
Comœdia (23 décembre)
Horatio, “Les Échos”, Comœdia (23 décembre 1927) 2.
Les Échos
Tout ce qui brilla n'est plus de l'or.
On vient de disperser à la Salle Drouot, en enchères publiques, ce que contenait l'atelier de Louise Abbéma. Cet atelier fut fréquenté dans le dernier quart du siècle dernier par tout ce qui avait un nom illustre dans le monde des lettres et des arts. La célèbre femme-peintre, amie de Sarah Bernhardt, n'a pas laissé au cœur de la génération égoïste d'aujourd'hui de souvenirs très durables. Ceux, matériels, que l'on dispersa d'elle et des artistes de son temps, atteignirent des prix impressionnants… de modestie.
La gloire de la grande Sarah ne s'étendit pas de l'artiste de la scène à celle de l'ébauchoir, car un buste de Louise Abbéma fait par elle fit péniblement 360 francs.
Des œuvres de Clairin, Régamey, Lepic, de Nittis ne furent guère plus recherchées.
Quant à celles de la pauvre Louise Abbéma, elles n'atteignirent même pas le prix de leur cadre. Un grand portrait de vieille dame fut adjugé 28 francs! Celui d'un monsieur avec un petit chien fit 32 francs Une marine dans un très beau cadre estimé 500 francs ne trouva preneur qu'à 105 francs.
C'est toute une époque qui s'en allait ainsi en fumée. II y a, semble-t-il, dans ce dédain d'œuvres qui voulurent la fixer, quelque chose de profondément injuste.
La guerre n'a pas tué que des hommes.
Horatio
L'Action française (24 décembre)
Paul Gille, “La Curiosité”, L'Action française 20/358 (24 décembre 1927) 4.
La Curiosité
(…)
À la vente de l'atelier de Louise Abbéma, un album renfermant entre autres dessins un lavis à l'encre de Chien par Carle Verne et deux dessins par J.-B. Isabey a été adjugé 2.000 fr.
Paul Gille.
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