Corpus Essonnien

Histoire et patrimoine du département de l'Essonne

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Gustave Desjardins (1834-1902)

  • Archiviste du département de Seine-et-Oise (1869-1874)
  • Auteurs de travaux archivistiques et historiques

Famille

  • Gustave-Adolphe Desjardins, né le 25 août 1834 à Sarreguemines (Moselle), était le fils de Louise-Pauline Desjardins (née à Hanovre vers 1812), elle-même fille de Jean-Jacques Desjardins officier en retraite et de son épouse Madelaine Gallot).
  • Il mourut à Bourron (Seine-et-Marne) le 25 septembre 1902, âgé de 68 ans.
  • Inhumé à Paris au cimetière du Montparnasse.

Carrière

  • Études classiques Lycée de Metz.
  • Élève pensionnaire de l'École des Chartes
  • Archiviste-paléographe diplômé (promotion du 11 novembre 1856)
  • Chargé de cours à l'École des chartes.
  • Archiviste du département de l'Aveyron (1856-1862), inspecteur des archives communales
  • Archiviste du département de l'Oise (1862-1869)
  • Archiviste du département de Seine-et-Oise (1869-1874)
  • Sous-chef de bureau au ministère de l'Intérieur chargé du service des archives départementales (1874-1877…)
  • Correspondant du ministère de l'instruction publique pour les travaux historiques (…1873-1877…)
  • Chef du 2e bureau de la division du secrétariat (1880)
  • Départ à la retraire en 1897.
  • Chef de bureau honoraire du bureau des Archives au ministère de l'instruction publique (…1902)
  • Membre Comité des travaux historiques (section d'histoire et de philologie)
  • Auteurs de travaux archivistiques et historiques

Distinction

  • Officier d'académie
  • Mention honorable au concours des antiquités de la France à l'Académie des inscriptions et belles-lettres (1866)
  • Prix Marcellin Guérin à l'Académie française (1886)
  • Chevalier de la Légion d'honneur (1877)

Publications

Concernant l'Essonne

Autres publications

  • Armoiries de la ville de Rodez (Rodez, 1861, in-8°)
  • Évêques de Rodez au IXe, au Xe et au XIIe siècle (Paris, 1863, in-8°)
  • Histoire de la cathédrale de Beauvais (Beauvais, 1865, in-4°)
  • Le Beauvaisis, le Valois, le Vexin français, le Noyonnais en 1789 (Beauvais, 1869, in-8°)
  • Recherches sur les drapeaux français, sur l'oriflamme, bannière de France (1874, gr. in-8°)
  • Essai sur le Cartulaire de l'abbaye Sainte-Foy de Conques (1879, in-8°)
  • Le Petit Trianon, histoire et description (Versailles, 1885, gr. in-8°)
  • Etc.

Documents

  • Naissance à Sarreguemines en 1834 — AN LH/750/20.

  • Option pour nationalité française en 1872 — AN BB/31/103 (liste d'optants pour la nationalité française après la perte de l'Alsace-Lorraine).

  • Promotion en 1880Bulletin officiel du Ministère de l'intérieur

  • Pension de retraite en 1897 — Journal officiel de la République française 29/171 (26 juin 1897) 3563.

  • Article de la Grande EncyclopédieLa Grande Encyclopédie (1885-1902), tome 14, p. 250.

  • Décès à Bourron en 1902 — AD77 6E51/13.

  • NécrologieL'Abeille de Fontainebleau 68/42 (17 octobre 1902) 5.

Archives

Archives nationales

Bibliographie

Abeille de Corbeil (1873)

  • L'Abeille de l'arrondissement de Corbeil 63/7 (15 février 1873) 6.
    • Extrait
      • Il vient de paraître à Versailles un volume in-8° de 140 pages, intitulé: Tableau de la guerre des Allemands dans le département de Seine-et-Oise. Ce livre, dû à M. Gustave Desjardins, archiviste du département, présente un intérêt local qui nous engage à le signaler à l'attention des habitants de l'arrondissement de Corbeil. Divisé en 9 chapitres ayant pour titres: 1. Au début de la campagne; — II. Investissement de Paris; — III. Reconnaissances et réquisitions; — IV. De Brauchitsch, préfet prussien de Seine-et-Oise; — V. L'occupation allemande; — VI. Le Moniteur Officiel prussien; — VII. Autour de Paris; — VIII. L'armistice; — IX. Attitude du département, ce travail fait nettement ressortir les dures épreuves qu'a supportées le département de Seine-et-Oise par suite de sa position géographique lors de la dernière invasion. C'est un ouvrage utile à consulter si l'on veut se rendre un compte exact des exigences du vainqueur, de l'attitude des populations, des sacrifices de tous genres qu'elles ont dû faire.
      • Ce travail, commencé sous la direction de l'honorable M. Cochin, a été terminé par M. Desjardins, archiviste de la préfecture de Seine-et-Oise, qui déclare qu'il n'a allégué aucun fait dont il ne soit prêt à fournir la preuve.

Aron (1873)

  • Henry Aron, “Tableau des la guerre des Allemands”, Journal des débats politiques et littéraires (30 mars 1873) 3.
    • Extrait
      • VARIÉTÉS. — Tableau de la guerre des Allemands dans le département de Seine-et-Oise (1870-1871), par Gustave Desjardins, archiviste du département de Seiae-et-Oise, ancien élève de l'Ecole des Chartes. Un vol. in-8°. Cerf et fils, éditeurs-imprimeurs de la préfecture, à Versailles.
      • Les malheurs de là dernière guerre ont bien peu contribué jusqu'à ce jour au réveil de la poésie en France; le roman lui-même, qui fait sa proie de toute chose et que l'on a pu appeler quelquefois l'épopée de ce siècle, n'a tiré encore aucun parti de cette triste et héroïque matière. C'est peut-être que ces souffrances nationales sont trop près de nous; on les respecte, on craint de les profaner ou de les raviver; l'art lui– même ce grand médecin de toutes les nobles douleurs, n'ose encore y porter la main. C'est peut-être aussi, il faut le bien dire, que nous n'avons point assez profondément souffert et que nous n'avons point, malgré l'immensité de notre désastre, senti d'assez près passer sur nos têtes ce souffle de la mort qui réveille l'âme d'un peuple au moment même où il abat sa force matérielle. Disons-le, et ne nous en plaignons pas, nous sommes demeurés trop vivans au milieu même de notre ruine, nous sommes devenus aussi trop sages, et, comme on dit, aujourd'hui trop pratiques pour nous laisser aller aux gémissemens et aux lamentations. Nous n'étions plus déjà que bien peu poètes avant la guerre, si chimériques que nous fussions restés; aujourd'hui nous paraissons avoir dit adieu tout ensemble à la chimère et à la poésie; nous sommes revenus à la prose et tout porte à croire que nous y demeurerons longtemps encore, n'ayant point eu à regretter, à ce qu'il semble, cette tardive et salutaire résipiscence. Relevons-nous d'abord, guérissons nous; nous pleurerons après et nous chanterons, si le génie français n'a point désappris dans ces épreuves le secret des poétiques larmes.
      • L'histoire sera vraisemblablement mieux partagée que la poésie; il n'y a pour elle ni heure plus ou moins propice ni repos quand la grande histoire paraît sommeiller, la petite, celle qui prépare l'autre, fait son œuvre laborieuse, réunit les documens et les témoignages, entasse les matériaux. Nous avons eu déjà à signaler un de ces livres excellens et modestes où l'auteur a su se borner à étudier un point et un aspect particulier de la guerre de 1870 1). En voici aujourd'hui un autre plus sobre de considérations, d'une portée moins haute peut-être, mais nourri de faits et ne le cédant au premier ni pour l'intérêt des récits ni pour la valeur et la sincérité dès témoignages.
      • M. Gabriel Monod avait spécialement rendu compte des événemens de la guerre dans les Ardennes et dans la Beauce; M. Gustave Desjardins nous donne le tableau de cette même guerre dans le département de Seine-et-Oise. La première partie du livre raconte les faits qui ont précédé l'occupation définitive du département. Elle porte une vive lumière sur deux points très contestés de la guerre des Allemands dans les départemens voisins de Paris. La guerre y a été plus sauvage, plus brutale et plus cruelle qu'on ne l'a dit ou cru généralement; il s'y est dépensé, dans les petites troupes irrégulières contre lesquelles l'esprit public est aujourd'hui si prévenu, beaucoup de courage et même d'héroïsme.
      • Les traits de brutalité et de sauvagerie, provoqués ou non, sont tels, que nous osons à peine, à cette heure d'apaisement et d'oubli, en citer des exemples. La grande excuse des Allemands, nous le savons, ce sont les francs-tireurs. Il faut le dire, si cette excuse pouvait avoir quelque valeur, elle en aurait surtout une très grande après la lecture du livre de M. Desjardins: les francs-tireurs, dans le département de Seine-et-Oise, ont tenu bravement la campagne et vivement harcelé l'ennemi. M. Desjardins est un témoin bien impartial; en principe, il n'aime point les corps-francs; il faut bien cependant qu'il leur rende quelquefois justice, les faits sont là. “À la Montignotte, près de Milly, une vingtaine de francs-tireurs et de gardes nationaux attaquent 62 hussards prussiens et les forcent à se retirer, le 26 septembre. Le 28, enhardis par leurs succès, ils ne craignent pas de s'en prendre à une colonne de 800 cavaliers et fantassins, envoyée de Melun pour châtier Milly, et lui font éprouver des pertes sensibles, sans pouvoir cependant l'empêcher d'entrer dans la ville.” À Courpain, deux compagnies de francs-tireurs se sont retranchées dans une ferme et ont ouvert le feu contre l'ennemi. Ils tiennent bon sous la canonnade qui passait au-dessus de leur tête et va s'abattre sur le village de Fontaine. Mais, sur le soir, ils apprennent qu'ils ont devant eux, non pas seulement, comme ils le croyaient l'arrière-garde d'une division, mais un corps d'armée tout entier, et ils se replient sur Méréville pendant la nuit. “Ils avaient, dit M. Gustave Desjardins, arrêté une journée les Allemands, qui durent camper autour de Marolles et la Forêt-Sainte-Croix, et ne purent gagner que le lendemain leur gîte d'étapes. L'arrière-garde des francs-tireurs leur tue 8 hommes à Méréville.” Un peu plus loin, il rencontre d'autres partisans, ceux du Gers. 46 de ces braves se sont embusqués dans les fossés de la route nationale n° 20, au nord d'Angerville; ils accueillent l'ennemi par une fusillade bien dirigée. Mais, cernés par des masses d'infanterie, après une résistance désespérée, ils sont presque tous tués ou pris.
      • Un trait à noter, c'est que dans le département de Seine-et-Oise, du moins dès le début de la guerre, l'habitant et le franc-tireur paraissaient vivre en bon accord; c'est que dans ces pays-là l'habitant se bat et fait son devoir. Dans maints villages ou petites villes, il se trouve quelque vieux soldat, officier retraité, notable de l'endroit, pour former une bande et marcher à l'ennemi. Nous aurons tout dit d'un mot quand nous aurons montré les paysans eux-mêmes s'organisant en guérillas. C'est du moins ce que nous voyons au Tremblay, à Craches, à Rochefort, à Condé, à Maurepas, au Perray.
      • Nous renvoyons le lecteur au livre de M. Gustave Desjardins, ne pouvant faire une plus large place dans le cadre de cet article aux récits de cette guerre confuse, disséminée, désordonnée aussi, mais pleine d'héroïsme des premiers jours. L'auteur l'a racontée simplement, fait par fait, n'essayant point de nous donner une peinture d'ensemble ni de tracer des lignes générales, ce qui eût d'ailleurs été impossible et aurait nui vraisemblablement à la vérité énergique de ses tableaux.
      • La partie, sans contredit, la, plus intéressante du livre de M. Desjardins est celle qui traité de l'occupation prussienne à Versailles. La situation de Versailles durant la guerre a été unique et particulièrement douloureuse. Peu de souffrances matérielles mais, comme le dit éloquemment M. Desjardins, “l'âme y était blessée à mort.” II n'y a point de supplice comparable à l'isolement de cette cité malheureuse, emprisonnée dans une double ignorance et condamnée à ne rien connaître, ni de la province ni de Paris. “Dans nos maisons, dit l'auteur, nous exerçons sur nous-mêmes, sur toutes les démarches des Allemands une surveillance minutieuse; leurs moindres mouvemens, les mots qui leur échappent, les impressions de joie ou de tristesse qui passent sur leur visage, sont saisis au vol, donnent matière aux conjectures.” De temps à autre une lettre, un journal parvient à percer le blocus; avec quelle avidité on se communique la nouvelle, vieille souvent, hélas de plu sieurs semaines. Parfois cependant les Allemands parlent; disent-ils vrai, mentent-ils? la crédulité des pauvres Versaillais est mise à la torture. De ce que fait ou prépare l'ennemi, ils ne savent rien ou ils ne le savent qu'à demi et mal, et si par hasard ils ont quelque certitude, il y a alors une douleur plus grande encore: celle de connaître le péril et de ne pouvoir avertir. Ce qui ajoute encore à l'ignorance, c'est la manière silencieuse dont l'ennemi accomplit tous ses mouvemens de guerre, que ne dénonce ni le bruit du tambour ni celui de la trompette. Pendant toute la durée du siège, on n'entendit pas plus de quatre fois le signal d'alarme.
      • Dans la ville, cependant, la vie est paisible, normale en apparence: Versailles jouit de la présence de l'empereur-roi, c'est là son lot. L'arrivée du souverain a été annoncée et saluée “comme une aurore de miséricorde.” On éloigne de ses yeux tout ce qui pourrait blesser son cœur. Ayant à choisir un local pour la prison, les fonctionnaires prussiens vont le chercher bien loin du palais où réside le monarque, afin de lui épargner le spectacle attristant de ces misères. Si les Versaillais voulaient se résigner, devenir un peu Allemands, ils seraient heureux et ne s'apercevraient de rien, sinon des réquisitions très fréquentes qu'on leur impose. Le préfet, M. de Brauchitsch, déploie un art admirable à faire fonctionner la machine française avec des rouages allemands; il administre, il réquisitionne, il châtie, il conseille l'opinion publique et la morigène comme tout bon préfet, il a un journal. Le journal s'intitule d'abord le Nouvelliste de Versailles, journal politique quotidien; bientôt l'officieux Nouvelliste devient le Moniteur officiel du département de Seine- et-Oise. Il passe de l'in-quarto à l'in-folio, puis de la simple feuille à la double feuille. Il prend tout à fait les allures d'un journal ordinaire. Il publie les mercuriales des marchés, la liste des décès, les annonces commerciales des juifs allemands venus à Versailles pour y ouvrir des magasins de comestibles d'armes et d'effets d'habillement. Enfin, ajoute M. Desjardins, il se complète par des variétés littéraires. “L'abonné, fatigué de la politique, peut se reposer dans la lecture d'un roman choisi avec une délicatesse infinie. Le directeur, comprenant que des couleurs trop vives blesseraient nos yeux endoloris, n'étend devant eux que des nuances douces, fondues dans une lumière grise. Il nous sert les impressions sentimentales d'une jeune malade guérie par les effluves de l'amour.”
      • Comment l'âme du malheureux habitant de Versailles, cette âme “blessée à mort”, ne se serait-elle point guérie elle-même et consolée à ce régime? Elle résiste cependant; ce mensonge de la vie, dont on veut lui donner l'illusion, ne fait que l'exaspérer davantage, au lieu de la distraire. Ce journal, dit M. Desjardins en parlant du Moniteur officiel prussien, fut le supplice le plus aigu de l'invasion.
      • Malgré l'ignorance, malgré les nouvelles mensongères, malgré l'assoupissement auquel on les veut condamner, les Versaillais ne s'endorment ni ne se découragent; ils se tiennent prêts. Le tambour et la trompette allemande ont beau se taire, il y a des jours où c'est le canon français qui tonne. On le croit, on le devine tout près de Versailles. Alors la vie, la vraie vie ardente et enfiévrée des jours de guerre et de péril, de victoire peut-être, brise les liens dont on l'enchaîne et éclate. C'est ce qui arrive au jour mémorable de la sortie de la Jonchère. “Les femmes, dit l'auteur, rassemblées devant les maisons, exprimaient tout haut leur colère et leur espoir. Les hommes assistaient, menaçans, aux mouvemens de l'ennemi qui massait ses réserves sur la place d'armes. Le commandant prussien fit mettre, pour les intimider, six canons en batterie. Le soir, M. de Bismark manda le maire pour lui témoigner son mécontentement de l'attitude des Versaillais, “qui, dit-il, groupés sur les places et avenues, semblaient attendre les événemens pour y prendre part.” Ce sont ses propres paroles. Le lendemain, une affiche nous avertissait que les troupes, en pareille circonstance, avaient ordre de faire feu sur quiconque sortirait de sa maison, quand on aurait sonné l'alarme.”
      • Si la partie qui s'occupe de l'occupation prussienne à Versailles est la plus intéressante dans ce livre de M. Desjardins, la plus douloureuse et la plus poignante est celle qui est intitulée: Autour de Paris! “Qui dira, s'écrie l'auteur en commençant ce chapitre, les souffrances des habitans des villes et des villages compris dans le cercle d'investissement?” II faudrait en effet, pour approcher de la réalité des faits dont cette région désolée a été le théâtre, l'imagination de quelque poëte tortionnaire habile à inventer et à rêver des supplices. II y a eu bien véritablement tout autour de Paris comme un immense cercle de douleurs. Les obus français s'y croisaient avec les obus prussiens; pendant des mois il a fallu cacher et chercher sa vie dans cette tourmente de fer. Le moindre mot le moindre mouvement le silence même devenait suspect; on était arrêté, emprisonné, fusillé. Bientôt les rigueurs individuelles ne suffisent plus, on procède par exécutions générales. Alors commencent les expulsions en masse, les exodes. “Les habitans de Saint-Cloud reçoivent dès le 5 octobre l'ordre d'évacuer leur ville, les Prussiens leur donnant tout au plus vingt-quatre heures pour se préparer au départ. À Garches, le délai n'est que de deux jours. Ces malheureux défilent tristement, un petit paquet à la main, entre deux rangées de soldats, sans savoir où on les mène et comment ils pourront vivre. Athis-Mons voit passer ainsi les habitans de Thiais et de Chevilly (Seine); ceux de Chennevières sont internés à Pontault (Seine-et-Marne), ceux de Gournay à Torcy. Versailles donne l'hospitalité à la population de Bougival, Garches, Meudon, Saint-Cloud. L'hospice de Gonesse sert de refuge à des prêtres chassés de leur domicile avec leurs paroissiens.”
      • Nous en pourrions citer bien long comme cela, et il est probable que M. Desjardins lui-même n'a point tout dit. Bien des souffrances, bien des héroïsmes, et, pourquoi ne point le dire? plus d'une lâcheté et d'une trahison ont été ensevelies dans l'ombre de cette nuit toute troublée d'éclairs livides qui tourbillonna durant cinq longs mois autour de nos murailles. Il faut savoir gré à M. Gustave Desjardins de s'y être pris à temps pour soulever un coin du voile sinistre; son témoignage exact, minutieux, véridique sera d'un très utile secours aux historiens qui reprendront ces faits dans l'avenir pour les rattacher dans une vue d'ensemble à l'histoire générale de la France dans cette période néfaste, mais non sans gloire, de notre vie nationale.
        • Henry Aron.

Mézières (1873)

  • A. Mézières, “Les Allemands dans le département de Seine-et-Oise”, Le Temps 13/4423 (24 mai 1873) 3.
    • Extrait
      • BIBLIOGRAPHIE
      • LES ALLEMANDS DANS LE DÉPARTEMENT DE SEINE-ET-OISE 2).
      • Dès que le regrettable M. Cochin eut été nommé préfet de Seine-et-Oise, il crut de son devoir de provoquer dans tout le département confié à ses soins une enquête sur les douloureux événements qui venaient de s'y accomplir pendant toute la durée de la guerre. Ce sont les résultats de cette enquête que publie aujourd'hui M. Gustave Desjardins, archiviste de la préfecture de Versailles, ancien élève de l'École des Chartes.
      • On retrouvera dans le consciencieux travail de M. Desjardins les habitudes d'esprit que développe le rigoureux enseignement de l'école d'où il est sorti. On s'y défie de la rhétorique et de la déclamation; on n'y estime que les faits; aussi les recherche-t-on avec le plus grand soin et prend-on pour les constater toutes les précautions qu'exige aujourd'hui la véritable méthode scientifique. M. Desjardins devait se garder d'autant plus de rien hasarder d'inexact qu'il était suspect d'avance de partialité envers son pays, d'hostilité systématique contre l'Allemagne. Il a rempli sa tâche, non de manière à contenter les Allemands, mais sans leur offrir le moindre prétexte d'accuser sa vivacité et de démentir ses assertions. Si le miroir qu'on leur présente n'a rien qui les flatte, ils ne doivent s'en prendre qu'à eux-mêmes de la triste fidélité de la peinture.
      • Il est bon que cette leçon soit donnée aux vainqueurs, qu'on voie l'envers de la gloire, qu'on sache à quel prix s'achètent les grands succès, ce que les victoires les moins contestables coûtent à l'humanité; L'Allemagne peut être fière de l'organisation de son armée, de la discipline de ses soldats et de la stratégie de ses généraux; mais ces glorieux souvenirs ne sont pas les seuls que rappellera la campagne de 1870. Le monde n'oubliera point que cette même année a vu ériger en principe le bombardement de villes ouvertes et l'impitoyable système des otages. Il est douteux que les philosophes allemands de l'avenir se félicitent du nouveau chapitre que leurs compatriotes viennent d'ajouter à l'horrible histoire de la guerre.
        • Il y a dans l'ouvrage de M. Desjardins des faits qui ne s'effaceront plus de la mémoire des hommes, tant que les hommes conserveront la notion de la justice, le sentiment de ce que doivent les forts aux faibles, les soldats en armes aux populations inoffensives. Il semblera toujours monstrueux que les paysans français aient été rendus responsables des actes de guerre que les troupes françaises commettaient aux environs de leurs villages, non-seulement sans les avoir prévenus, mais souvent même malgré eux; que des francs-tireurs, organisés militairement, revêtu d'un uniforme, pourvus de commissions régulières, aient été fusillés de sang-froid, après avoir été pris, les armes à la main, dans la chaleur du combat. M. Desjardins cite des noms, des lieux, des dates et déclare hardiment qu'il n'allègue aucun fait dont il ne soit prêt à fournir la preuve.
      • M. Gustave Desjardins ne nous présente pas toujours des tableaux aussi sombres. Après avoir maudit l'ennemi, il est permis à un bon patriote de s'égayer à ses dépens. La guerre, même la plus heureuse, ne se compose pas toujours de succès sans mélange. Nos vainqueurs ont commis plus d'une bévue; il leur est arrivé plus d'une mésaventure que l'ex-archiviste de Versailles éprouve un malin plaisir à relever. On rira longtemps à Corbeil de l'empressement avec lequel un major prussien, ayant entendu parler des cuirs que faisait un paysan trop enclin aux liaisons de mots malencontreuses, crut avoir affaire à un tanneur et lui adressa une réquisition de 60 peaux pour basaner les culottes de ses dragons.
      • M. de Brauchitsch, préfet allemand de Versailles, n'eut guère à se féliciter d'avoir invité l'inspecteur d'académie à lui rendre compte de l'étude de l'instruction primaire dans le département. Après avoir longtemps refusé de répondre, M. Anquetil, sommé de s'exécuter, se lira spirituellement d'affaire. Il fit remettre, dans les premiers jours de janvier, au concierge de la présidence un pli portant cette souscription: à déposer aux archives départementales, et contenant le rapport de fin d'année au recteur. Dans ce document l'inspecteur signalait à son chef tous les excès qu'avaient commis les Prussiens la maison d'école de Saint-Illices-le-Bois transformée en abattoir et en boucherie, les feux de joie allumés à Herblay et à Montgeron avec les cahiers, les livres et les tables des écoliers; ailleurs les maîtres et les élèves chassés de la classe à coups de plat de sabre. “M. de Brauchitsch, ajoute M. Desjardins, n'insista plus pour obtenir la communication de l'inspecteur d'académie.” C'est ainsi que le narrateur sait au besoin changer de ton, et mêler un peu d'agrément aux récits les plus tristes. Il ne le fait du reste qu'en passant, par occasion, à de rares intervalles. La note grave domine dans son livre, comme il convient en un aussi douloureux sujet.
      • Le substantiel ouvrage de M. Desjardins où les faits seuls ont la parole, où rien n'est donné à l'amplification oratoire, sera un document nécessaire pour les historiens futurs de, la campagne de 1870. Je douté seulement que les écrivains allemands s'en servent aussi souvent et le citent aussi volontiers que les écrivains français.
        • A. Mézières.

Affre (1902)

  • Bulletin d'Espalion (25 octobre 1902) 1.
    • Extrait
      • Notre savant et honoré compatriote M. H. Affre, nous adresse les lignes suivantes:
        • Mon cher Directeur,
      • J'apprends avec tristesse la mort de M. Gustave Desjardins, mon prédécesseur à la direction des archives départementales de l'Aveyron. Mes cordiales et nombreuses relations avec ce savant archiviste m'autorisent à lui consacrer quelques lignes de bons souvenirs, que vous voudrez bien, j'espère, insérer dans le Bulletin.
      • Eu 1856, la direction des archives devint vacante par la retraite de M. Allaume, après quelques mois de fonctions. M. Léon Sencier, notre Préfet, me fit l'honneur de m'appeler à ce poste; mais, comme je n'étais pas sorti de l'École ces Chartes, le Ministre, se conformant aux instructions, ne put accepter le candidat du Préfet, et fit choix de M. Desjardins, élève sortant de cette École.
      • Le premier soin de celui-ci fut d'apporter des améliorations notables au local du dépôt. Grâce à des allocations successives du Conseil général, il fit approprier les combles qui reçurent le trop plein des salles destinées aux archives modernes.
      • Peu de temps après son installation, Desjardins entreprit l'inspection des dépôts communaux et sous-préfectoraux du département. Il constata la richesse de celui de la ville de Millau et manifesta l'utilité qu'il y aurait pour l'histoire d'en faire l'inventaire. Ce travail ne fut fait par moi que plus tard. Il est à l'état manuscrit. M. Jules Artières, imprimeur à Millau et membre de la Société des lettres, sciences et arts de l'Aveyron en a fait connaître l'importance historique dans son ouvrage, Les Annales de Millau.
      • À son arrivée à Espalion, M. Desjardins vint me voir, et notre premier entretien, quoique de courte durée, fit comprendre à l'un et à l'autre que nous étions faits pour nous entendre. Je lui fis faire la connaissance des monuments anciens du beau vallon d'Espalion, tels que Perse, Bonneval, Roquelaure, Calmont-d'Olt, etc.; ce que nous fîmes en promeneurs plutôt qu'en excursionnistes, étant l'un et l'autre de complexion délicate et manquant de cette solidité de jarret qui fait les vrais touristes.
      • Durant ces visites, à travers une campagne ondulée et des plus richement parées, nos entretiens ne manquaient pas d'intérêt. Je lui faisais l'historique de ces vestiges plus ou moins anciens du passé; il me parlait des sciences qu'on enseignait à l'École des Chartes, et il m'était aisé de comprendre qu'il avait suivi avec intelligence et beaucoup de goût les leçons de Léon Cabane, presque notre compatriote puisqu'il était de Figeac, d'Alfred de Wailly et d'autres professeurs distingués, qui tous ont laissé de remarquables travaux sur notre pays. Il trouva nos archives communales en bon état. J'en avais déjà fait un premier inventaire que je refis plus tard pour me conformer à l'uniformité prescrite par les instructions ministérielles.
      • Parmi les choses rares et précieuses que possède le musée de Rodez, se trouvait le cartulaire de la célèbre abbaye de Conques, dont le trésor a été l'objet de remarquables travaux. Ce manuscrit, en parchemin, ne pouvait manquer de frapper l'attention de M. Desjardins. Celui-ci, appréciant toute sa valeur historique, en entreprit aussitôt la transcription avec l'intention de le publier. Il ne fallait, pour atteindre ce but, rien moins que la patience et le savoir d'un bénédictin; notre archiviste, quoique jeune encore, possédait tout cela.
      • Il se mit à l'œuvre, au risque de retarder l'inventaire des archives départementales. Cependant, malgré son activité fiévreuse, la besogne n'était pas tout à fait achevée quand, à la fin de 1861 ou dans les premiers jours de janvier 1862, il reçut son changement pour Beauvais. Je fus appelé à lui succéder. Nous eûmes dès lors de fréquentes relations, car il n'avait pas renoncé à son projet de publication. Mais le manuscrit était à Bodez, et la Société des Lettres, par une crainte un peu excessive, mais légitime à cause de la valeur inappréciable de ce manuscrit, hésitait, a s'en dessaisir.
      • Sur le conseil de M. de Rozière, inspecteur général des Archives, alors à Rodez, j'intervins auprès de celle-ci, et comme le ministre de l'instruction publique se portait garant de sa conservation, j'obtins que l'envoi lui en fut fait.
      • Aux renseignements nombreux qu'il me demandait, touchant des noms de localités où de choses dont il ignorait la signification, je fus assez heureux pour le satisfaire sur bien des points. Il s'en montra reconnaissant en me faisant comprendre parmi les membres correspondants du Comité de l'instruction publique pour les travaux historiques.
      • Le travail, commencé dans l'Aveyron, fut repris et mené à bonne fin au ministère que je viens de nommer et où M. Desjardins remplissait les fonctions de chef de bureau des archives. Le volume fut imprimé en 1879, sous le format,grand in-8° par les soins de la Société de l'École des Chartes. On y trouve des tables et des notes qui, avec le fonds, constituent une source de renseignements sans nombre pour l'histoire de noire vieux Rouergue. Les lettrés de l'Aveyron ne sauraient assez se féliciter de cette publication, dont ils sont redevables a M. Desjardins, auquel elle fait le plus grand honneur.
      • Né de parents catholiques et élevé par une mère de grande piété, M. Desjardins se trouva à Rodez au milieu d'une population essentiellement chrétienne, pratiquant toujours le fidelis Deo de sa noble devise. Il s'y fit bientôt un petit groupe d'amis qui goûtaient le charme de sa conversation et partageaient pleinement sa foi.
      • Après une laborieuse carrière des plus honorables, il s'était retiré, je ne sais depuis combien de temps, à Bourron (Seine-et-Marne). C'est là qu'il s'est éteint dans la paix, j'en suis convaincu, d'une conscience tranquille, consolation suprême aux derniers jours de la vie.
        • H. A.

E. M. (1902)

  • E. M., “Nécrologie. M. Gustave Desjardins”, L'Abeille de Fontainebleau 68/42 (17 octobre 1902) 5.
    • Extrait
      • NÉCROLOGIE. — M. Gustave Desjardins.
      • Le jeudi 25 septembre dernier, à la suite d'une courte maladie, M. Gustave Desjardins, chef de bureau honoraire du ministère de l'Instruction publique, ancien chargé de cours à'l’Ecole des Chartes, s'éteignait à Bourron, à l'âge de 68 ans.
      • Il était né à Sarreguemines, dans l'ancien département de la Moselle, aujourd'hui annexé, et après avoir fait au lycée de Metz de brillantes études littéraires, il entrait à l'École des Chartes. À sa sortie, il était successivement nommé archiviste à Rodez, puis à Beauvais, et tout en classant avec autant de zèle que de méthode les pièces des dépôts confiés à sa garde, il profitait de son séjour dans l'Aveyron pour faire sur le Trésor de l'abbaye de Conques un travail d'érudition remarquable, suivi bientôt après, dans l'Oise, d'une étude d'archéologie critique sur la cathédrale de Beauvais. Appelé en 1870 à diriger les archives de Seine-et-Oise, il sut, pendant l'occupation de Versailles par l'armée allemande, les soustraire aux recherches de nos vainqueurs et montra autant de courage devant leurs menaces que d'habileté à éluder leurs pressantes requêtes à cet égard. La paix conclue, M. Desjardins, que sa situation avait mis à même d'être bien renseigné, publia d'après les documents officiels un volume sur les diverses phases de l'occupation dans le département de Seine-et-Oise.
      • Rendu à ses études favorites, il consigna dans un volume, aujourd'hui épuisé, le résultat de ses consciencieuses investigations sur l'histoire des Drapeaux français. Plus important encore est le bel ouvrage consacré par lui au Petit Trianon, et dans lequel tous les détails de la construction, de l'aménagement de ce palais et de ses dépendances, sont accompagnés de précieux renseignements sur les dépenses faites à ce sujet, sur la vie, les habitudes et les mœurs de la famille royale, et en particulier de la reine Marie-Antoinette et des hôtes qu'elle admettait dans son intimité. L'auteur y fait preuve d'autant de goût dans ses appréciations artistiques que d'impartialité dans les jugements qu'il porte sur cette période de notre histoire, jugements fondés tous sur les documents authentiques recueillis par lui, commentés et mis en œuvre avec un talent littéraire égal à la sûreté de sa méthode.
      • À côté de ces études qui font honneur à l'écrivain et au savant, M. Desjardins consacrait la plus grande part de son activité au service des archives départementales et à la bonne réorganisation de nos archives nationales. Ses collaborateurs comme ses élèves peuvent témoigner de tout ce que cet homme de bien a fait pour son pays, en dépit d'une santé très fragile, et que son courage et la constante régularité de sa vie ont pu seuls maintenir jusqu'à l'âge relativement avancé auquel il est parvenu.
      • Fatigué de ce travail incessant et désireux de se livrer à des études d'exégèse qui depuis longtemps le préoccupaient, M. Desjardins avait pris, il y a trois ans, sa retraite; mais il avait dû se rendre aux vives sollicitations qui lui étaient adressées par le directeur de l'École des Chartes et par le Conseil supérieur des Archives, pour faire encore pendant deux ans un cours pratique sur l'organisation et la bonne tenue de nos dépôts publics, cours que malgré des indispositions graves et fréquentes, il voulut achever et qui a été rédigé sous sa surveillance.
      • Depuis trois ans, il passait ses étés à Bourron où il projetait de faire un établissement définitif. Il aimait la forêt de Fontainebleau qu'il connaissait bien, depuis longtemps, et sur laquelle il avait réuni une foule de précieux renseignements. Il savait y varier ses promenades et en revoyait chaque année les aspects les plus pittoresques. La veille même de sa mort, bien que très affaibli, il s'y traînait pour y faire quelques pas, abordant au passage les paysans avec lesquels il se plaisait à converser. La bonté et la sympathie qu'il leur témoignait les avaient attachés à lui et quand la mort, qu'il attendait depuis longtemps avec la fermeté d'une âme profondément chrétienne, vint doucement le surprendre, un grand nombre des habitants de Bourron et de Marlotte, joints à quelques amis du voisinage, remplissaient la petite église pour rendre à ce citadin qu'ils avaient appris à connaître ce dernier hommage de leur gratitude et de leur affection.
        • E. M.

Dictyographie

1)
Allemands et Français, par Gabriel Monod. Un vol. in8°; Sandoz et Fishbacher. Mentionnons encore un livre sur l'occupation allemande dans le département de l'Aisne, par E. Lavisse.
2)
Tableau de la guerre des Allemands dans le département de Seine-et-Oise. Cerf et fils, Versailles, 1873.
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